Ecrit le 2 février 2024 | Neurosciences et conscience spirituelle
Les neurosciences et la conscience spirituelle sont des sujets complexes qui suscitent de nombreuses questions et débats. Comment le cerveau, une structure biologique complexe, donne-t-il naissance à cette expérience intime que l’on appelle la conscience ? Peut-on trouver sa source dans les méandres neuronaux ? Ces interrogations ont été au cœur d’un pari lancé il y a 25 ans entre le neuroscientifique Christof Koch et le philosophe David Chalmers. Malgré les avancées des neurosciences, cette question reste en suspens.
En 1998, dans un bar enfumé de Brême, le neuroscientifique Christof Koch a lancé un pari audacieux : détecter une signature spécifique de la conscience dans le cerveau grâce aux progrès des neurosciences dans les 25 prochaines années. Sceptique, le philosophe David Chalmers a parié contre lui. À la clé de ce pari, une bonne caisse de vin.
Vingt-cinq ans se sont écoulés depuis ce pari, et lors de la réunion annuelle de l’Association pour l’étude scientifique de la conscience (ASSC) qui s’est tenue à New York en juin 2023, les deux chercheurs ont publiquement conclu que la recherche n’était pas encore en mesure d’expliquer physiquement la conscience. Dans ce cas, le philosophe a remporté le pari, du moins pour l’instant.
La conscience est un sujet mystérieux pour les neurosciences. Alors que les premières cellules procaryotes sont apparues il y a plus de trois milliards d’années, le cerveau humain, aujourd’hui, contient plus de cent mille milliards de connexions synaptiques. Malgré cela, nous sommes toujours confrontés à la question de savoir comment cette structure biologique complexe donne naissance à une expérience consciente. La conscience semble être une réalité qui s’impose à l’expérience, mais dont l’origine et la destination restent inconnues.
Christof Koch, dans sa quête pour comprendre la conscience, s’est intéressé à un phénomène appelé « le problème du liage perceptif ». Il s’agit de l’unification et de la cohérence spatiale et temporelle de nos perceptions sensorielles. Comment pouvons-nous percevoir dans une conscience unifiée des éléments disparates qui n’ont a priori aucun rapport entre eux ? Selon Koch, la clé de ce processus se trouve dans les oscillations neuronales qui se produisent dans le cortex à des fréquences allant de 25 à 55 Hz. Chaque caractéristique perçue, comme la forme ou la couleur, correspondrait à une fréquence précise. Koch soutient que c’est la synchronisation de ces différentes oscillations qui donne naissance à l’unité perceptive consciente.
David Chalmers, de son côté, propose une distinction entre le « problème facile » et le « problème difficile » de l’étude de la conscience. Le « problème facile » consiste à trouver les processus cérébraux qui sous-tendent des phénomènes comme la perception, la mémoire et l’attention. Le « problème difficile », quant à lui, concerne l’aspect phénoménologique de la conscience, c’est-à-dire l’expérience subjective d’être conscient. Chalmers soutient qu’il existe une conscience phénoménale, irréductible à l’être purement physique, qui résiste à une explication purement physique. Selon lui, la science, en se limitant aux éléments purs de la physique, ne peut pas accéder à ce type de conscience.
Au cours des vingt-cinq dernières années, les neurosciences ont connu des avancées significatives. Les techniques d’imagerie cérébrale fonctionnelle, telles que l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, permettent désormais de visualiser les flux sanguins qui alimentent l’activité neuronale. Il est également possible d’insérer des électrodes pour détecter les impulsions électriques émises par des neurones individuels, ou encore de surveiller les ondes électromagnétiques qui balayent le cerveau par électroencéphalogrammes.
Au cours des vingt-cinq dernières années, deux théories ont été testées par six laboratoires indépendants. La première, la théorie de l’information intégrée (IIT), postule que la conscience est une structure de neurones connectés spécifique, située dans le cortex postérieur. Les chercheurs ont observé que les zones situées à l’arrière du cerveau contiennent de manière soutenue l’information liée à une expérience consciente. Cela semble valider le modèle de la structure, mais la preuve d’une synchronisation de l’information entre ces différentes zones échappe encore aux études. La deuxième théorie, la théorie de l’espace de travail neuronal global (GNWT), suppose que la conscience émerge dans le cortex préfrontal, au début et à la fin d’une expérience, lorsque l’information est diffusée à travers un réseau interconnecté entre différentes zones du cerveau. Cependant, la diffusion de cette information n’a été observée qu’au début de l’expérience et non à la fin, comme postulé.
Malgré les avancées des neurosciences, la question de la conscience et de son origine physique reste en suspens. Les recherches menées ces vingt-cinq dernières années n’ont pas permis de détecter une signature spécifique de la conscience dans le cerveau, comme l’espérait Christof Koch. David Chalmers maintient que la conscience phénoménale résiste à une explication purement physique. Bien que le philosophe ait remporté le pari, Christof Koch reste déterminé à poursuivre ses recherches dans les années à venir.
Le mystère de la conscience et son lien avec le cerveau restent donc un défi pour les neurosciences. Les progrès technologiques et les recherches futures pourraient nous apporter de nouvelles perspectives sur ce sujet fascinant, mais pour l’instant, le lien entre les neurosciences et la conscience spirituelle reste à découvrir.
Référence :
– https://naturalcluster.com